Operencia: The Stolen Sun

A peine quelques mois après le dernier dungeon crawler, l’excellent Bard’s Tale IV, le jeu de rôle Operencia: The Stolen Sun est sorti un peu de nulle part. Réalisé par Zen Studios, plutôt connu pour des jeux de flipper sur micro, ce dernier ne semblait pas vraiment destiné à déplacer les foules par son excellence. 

Avec une sortie en exclusivité d’un an sur le tout nouveau Epic Store, le jeu s’est fermé à toute les joueurs réfractaires à installer une nouvelle boutique sur leur machine, ce qui n’est pas anodin pour un éditeur presque inconnu, cherchant à se lancer sur une nouvelle licence. Autrement dit, le jeu a visiblement été massivement subventionné par cette nouvelle boutique, ce qui pouvait impliquer que ses auteurs ne croyaient pas trop à leur capacité à fédérer les joueurs derrière leur titre.

Le jeu était pourtant prometteur, un dungeon crawler proposant de l’exploration, des énigmes et des combats au tour par tour dans de jolis décors variés et un monde basé sur le folklore d’Europe central, ça paraissait plutôt intéressant. C’est donc avec pas mal de curiosité que j’ai installé et lancé ce titre qui m’a prouvé qu’après plus de 35 années à rouler mes guêtres sur les RPGs micro et sur le jeu vidéo, on peut toujours dénicher de véritables trésors.

Après quelques déplacements et combats avec un personnage pré-tiré dans un chapitre introductif, Operencia démarre avec une création de personnage, avec un choix assez sommaire, le joueur devant incarner un guerrier, un chasseur ou un mage, puis son origine, et peaufiner quelques caractéristiques (force, agilité, intelligence, sagesse et vigueur), un nom et un talent propre à sa profession. A ce stade, le titre ne donne pas trop de choix déroutants, et ce choix de départ ne fera qu’imposer pour la suite la profession du personnage qu’incarne le joueur, mais sera rejoint rapidement par d’autres personnages rencontrés en chemin, que le joueur aura à gérer et faire progresser.

Operencia, l’exploration

La première chose qui frappe lors des premières sessions de jeu d’Operencia est l’exploration. Nous sommes bien dans un dungeon-crawler en vue subjective, mais alors que la concurrence avait permis le déplacement libre, le studio a choisi de limiter ces derniers au case par case, tout en permettant de regarder autour de soi. On se sent bridé par ce manque de souplesse dans les déplacements dès les instants se déroulant dans des extérieurs. Pourtant le jeu est beau, on regarde autour de soi, on profite des décors, et on finit par constater au fur et à mesure de l’avancée dans l’aventure que ce style de déplacement est adapté à ce que le studio a réalisé.

l’automap est bien détaillée

Le gameplay comprend plusieurs phases. Tout d’abord la phase d’exploration : les déplacements se font case par case, avec en support une automap bien réalisée, notant non seulement le plan, mais également tous les éléments connus par le joueur permettant l’interaction. Les coffres ouverts ou non, les portes, les trappes, bref, l’ensemble des éléments susceptibles d’avoir été laissés de côté par manque de réflexion ou objet manquant. Soyons clair, cette phase est la plupart du temps au cœur du jeu, et sera au cœur de l’intérêt de ce titre. Ecrit comme ça, de l’exploration uniquement en case par case, ça ne parait pas très folichon, et pourtant le résultat est très réussi. Le studio a en effet particulièrement brillé sur les principaux points clés pour réussir sa copie. Tout d’abord, le jeu est non seulement joli dans son style un peu cartoon, mais également très varié. Que ce soit de la forêt sombre, des donjons, des ruines, un château dans les nuages, des forêts de métal ou d’autres coins exotiques, chaque niveau aura une identité visuelle forte. Dès qu’une pointe de lassitude se poindra dans l’esprit du joueur, il sera temps d’avancer et de passer à un autre décors. De même que pour les pièges ou les puzzles.

Des décours très variés

Parce que des énigmes il y en aura, toutes plus diversifiées les unes que les autres. Ici point de recyclage d’énigmes, on vous met en situation, la réponse est parfois évidente, parfois moins, mais jamais on ne laisse le joueur répéter ad nauseum les mêmes mécanismes de jeu. Au pire, on répète une ou deux fois l’énigme histoire de faire comprendre les mécanismes avant de passer aux choses sérieuses dans un autre contexte, mais le tout est fluide et toujours très logique. Pour ma part, j’ai fait appel 2 fois aux solutions sur Internet, et à chaque reprise je l’ai regretté, m’étant auto-spoilé pour une réponse que j’aurais pu trouver tout seul en étant un tant soi peu plus attentif ou avec un peu plus de réflexion.

Concernant les combats, on sera dans une même logique de renouvellement de l’expérience. Les créatures sont visibles lors de nos déplacements, et ce ne sera qu’au contact que l’interface changera pour passer en mode combat. Le premier tour dépendra d’un jet de dés, mais aussi de celui qui, joueur ou monstre, ira au contact dans le dos de l’adversaire ou non, ce qui déclenchera une embuscade de part ou d’autre.

De prime abord, les mode de combats sont assez déroutants. A la base rien de particulier : chacun des personnages de l’équipe du joueur ou des monstres réagira dans l’ordre en fonction de son initiative, et pourra soit opter pour une attaque au contact ou à distance, ou encore pour une compétence ou un sort. On constate pourtant très rapidement que, contrairement aux autres jeux, les coups standards ne servent pas à grand chose.

Les combats – gérer les résistances et les sensibilités est primordial

 En fait, le système de résolution des conflits prend un peu le joueur à contre-pied se règlent plus par l’utilisation des compétences adaptées pour amener l’adversaire à perdre plus de points de vie que vous. Cela paraît évident, mais au fur et à mesure de l’avancée du jeu, on se rend compte que nombre de talents anodins de prime abord feront s’accumuler les bonus, et mèneront les adversaires à se détruire eux mêmes plus qu’à leur infliger bêtement des dégâts. Bref, le système de combat est assez déroutant, mais n’est jamais bloquant. 

On notera aussi que les adversaires rencontrés dépendront de l’environnement traversé. Autrement dit, le joueur ne rencontre jamais plus de 2-3 adversaires de même type dans un des secteurs traversés, le temps de bien peaufiner sa tactique adaptée à tel ou tel type d’adversaire…. avant de passer à un nouveau territoire, de nouveaux adversaire impliquant de nouvelles tactiques !

Bref, encore une fois, le jeu s’évertue à renouveler l’expérience et à prendre le joueur à contre-pied afin de renouveler sans cesse l’expérience de jeu.

la feuille de perso

Au niveau de la gestion des personnages, bien entendu, chaque combat, chaque coffre apportera son lot d’objets. A chaque objet correspondra un certain nombre de bonus, plus adapté à tel ou tel type de personnage. On finit progressivement par avoir un inventaire bien rempli, avec des objets qu’il faudra affecter à l’un ou l’autre des personnages du groupe.

Après quelques heures de jeu, l’équipe s’étoffera d’ailleurs au point de devoir choisir lequel des compagnons sera dans l’équipe pour parcourir le niveau, et cela pourra se changer autour des différents feux de camps disséminés dans les niveaux. A noter que ces feux de camps permettront aussi de sauvegarder la partie à condition d’aller faire le déplacement, mais également de se reposer pour regagner les points de vie à condition d’avoir en stock du bois, mais rassurez-vous !

Si ce système demande de gérer un tant soi peu ses sessions, à aucun moment je ne suis tombé à cours de bois et revenir à un feu de camp est toujours possible en moins d’une minute. Bref, on limite le quicksave (il faut se donner le mal de parcourir un peu de carte), on régule un peu la récupération de la vie, mais sans embêter le joueur. C’est inédit, et c’est bien fichu ! Le feu de camp permettra également de mieux gérer son inventaire, faire un peu d’artisanat, ou même de revenir à une des zones traversées précédemment afin de débloquer certains secrets et récompenses sympathiques grâce à des objets trouvés entretemps. 

Un chateau dans les nuages

Je ne vais pas trop m’étendre sur le scénario. Operencia: The Stolen Sun raconte l’histoire …du soleil volé d’Operencia (!) qu’il faut aller récupérer en traversant moultes régions exotiques mettant en scènes divers contes et légendes, et faire des rencontres assez improbables. C’est totalement linéaire, avec quelques dialogues dans les régions traversées, des artifacts narratifs, mais également de sympathiques scènes intermédiaires expliquant le conte qui se déroule devant le joueur. On est transporté par le folklore et les histoires racontées ou non, cela dépendra en grande partie du joueur et des contes ou légendes rapportées.

Bref, vous l’aurez compris, j’ai passé vraiment un excellent moment avec ce titre, et j’espère vivement que le studio aura un retour financier suffisant afin d’envisager une suite ou un jeu du même genre.

des secrets et des énigmes

Certains détails de gameplay, tels que la gestion de l’inventaire font parfois un peu amateur, il y a des améliorations à apporter à l’interface globale du jeu, notamment au niveau du feu de camp qui est anti-ergonomique au possible, mais le talent est là, et le plaisir de jeu vraiment présent  ! Operencia est un dungeon-crawler exceptionnel, se renouvelant sans cesse au niveau de ses décors, de ses énigmes, de ses combats et de la manière d’aborder les objectifs. 
Jamais bloquant, ce dernier est superbement bien dosé, et tout joueur un peu plus attentif que moi sera à même d’en arriver à bout sans trop de difficulté (on notera plusieurs options de jeu avec différentes options d’aides, le niveau standard me paraissant le plus adapté).

Un jeu à recommander vivement autant pour les néophytes de ce style de jeu (il est très accessible), que pour les joueurs chevronnés.

Notes

Graphismes et sons : 4/5
C’est beau, c’est varié. Le côté technique et le moteur de jeu sont un peu en retrait, mais le titre brille par la diversité et la beauté de certains de ses décors. Chapeau bas sur le côté artistique. Niveau son, l’ambiance est plutôt réussie.

Interface de combat : 4/5
Plutôt réussi dans le style tour par tour, avec des combats sans cesse renouvelés par la diversité des adversaires rencontrés et de leurs tactiques de combat et résistances. Par contre, le jeu pêche particulièrement au niveau de l’interface de gestion aux feux de camps.

Scénario : 4/5 
Scénario original, avec le vol du soleil, l’implication d’un dragon, et la mise en scène de nombreuses légendes du folklore de l’Europe de l’Est. Après, niveau des dialogues, c’est assez sommaire lors de l’exploration, mais on apprécie la biographie et les commentaires incessants des compagnons du joueur.

Jouabilité (fun) : 5/5
Excellent titre, un incontournable pour les amateurs du genre, et vraiment un titre à essayer pour les autres.