Mass Effect Andromeda

Test par Sergorn

Malgré la fin sans équivoque de l’histoire du Commandant Shephard au terme de Mass Effect 3, il paraissait évident devant le succès de la trilogie de Bioware que la licence n’allait pas s’arrêter là. Qu’à cela ne tienne, le studio historique de Bioware Edmonton étant occupé l’explosif Anthem attendu pour fin 2018, c’est la toute jeune équipe de Bioware Montreal (en charge du multijoueur de Mass Effect 3 ainsi que de quelques DLC) qui prend la relève avec le pari audacieux de « réaliser la promesse de Mass Effect 1 ». Rien que ça !

Pari réussi ?

L’espace, l’ultime frontière…

Pour le coup Mass Effect Andromeda fait le choix de faire table rase de l’histoire de la précédente trilogie pour nous transporter plus de 300 ans après les aventures de Shepard en temps que membre de l’Initiative Andromède, une expédition lancée peu après le premier Mass Effect afin de créer une nouvelle civilisation dans la lointaine galaxie d’Andromède qui regorge de monde dorée et prompt à la colonisation.
Mais bien entendu les choses ne vont pas se dérouler comme prévue alors qu’une arrivée mouvementée révèle que le secteur de la galaxie est en proie à de mystérieux et destructeurs nuages noirs, et que l’arche humain se retrouve pris pour cible par les mystérieux Keth alors qu’il n’y a aucune trace des autres arches de colons. Suite à une introduction mouvementée, le joueur Ryder se retrouve ainsi attribué du rôle de Pionnier avec pour but de découvrir des lieux d’habitations viables pour les émigrés de la voie lactée, de percer les mystères des étranges vestiges qui par parsème l’amas d’Hepheus, mais aussi les mystères entourant l’initiative en elle-même, et tout cela en faisant face à la menace des Keth. Rien que ça !

Plein les mirettes

Utilisant comme Dragon Age Inquisition, l’excellent moteur Frostbite d’Electronic Arts, on était en droit de s’attendre à en prends pleins les yeux, d’autant que contrairement à son ainé, Andromeda allait faire fi d’une version cross-gen sur consoles, qui avaient limité les possibilités techniques du dernier Dragon Age.

Mais du coup, c’est un résultat en demi-teinte qui attend le joueur. On ne trouvera rien à redire aux magnifiques environnements du jeu. Les différentes planètes impressionnent, tout comme la magnifique vues galactiques que l’on observe par les verrières du Tempest – le nouveau vaisseau personnel du joueur et de son équipage. Il n’y a pas grand-chose à redire non plus aux nombreux aliens que l’on croise à travers le jeu hormis un certain manque de variété de visages pour certaines races. Mais par contre on se demande bien ce qui a pu se passer au niveau des personnages humains : animations figées, problèmes de textures et d’éclairages, expression faciales en décalage avec les dialogues et bugs plus ou moins nombreux, on est du coup bien en deçà de ce qu’on pouvait voir dans Dragon Age Inquisition quelques années plus tôt. Le pire étant dans les nombreux dialogues non cinématisés ou là ça vire parfois à la catastrophe dès que ça essaye de bouger. Si ce n’est heureusement pas systématique, et certes pas aussi catastrophique qu’on voulait le faire croire certaines vidéos sur internet, difficile de ne pas être déçu devant ce résultat, d’autant que Bioware nous a toujours habitué à de la grande qualité dans ce domaine.

Voila qui fleure bon hélas le manque de finition et c’est d’autant plus frustrant qu’on sent qu’avec un peu plus de finition, Andromeda aurait pu être l’une des plus belles réussites graphiques de l’année.

Mass Effect Inquisition ?

Si après le premier Mass Effect, Bioware s’était contenté d’un grand nettoyage par le vide des aspects controversé du premier épisode pour se focaliser sur l’approche grand spectacle épique, Andromeda donne l’impression d’être parti du premier épisode… et d’avoir pris la direction diamétralement opposée à celle de Mass Effect 2.

Au final, c’est un pari risqué mais on se dit que c’est sans doute l’approche la plus intéressante qu’aurait pu prendre cette série. Ainsi le côté exploration est maintenant au cœur de cet épisode et mènera le joueur à explorer des planètes inconnues à bord du Nomad, l’équivalent du Mako du premier épisode, sans armes cette fois-ci mais avec des contrôles tout à fait fonctionnels ! Le lien avec le tout premier Mass Effect est ainsi très clair et on a très vite ce sentiment qu’Andromeda a voulu se recentrer cet aspect qui avait disparu des épisodes suivants et qui est appuyé également par les choix scénaristiques mettant plus avant les nécessité coloniaux de l’initiative qu’une grande menace galactique.

Mais plus qu’un simple ME1-bis, on sent aussi que l’inspiration de Dragon Age Inquisition est très présente, avec ces grandes cartes à explorer bourrés de « point d’intérêts » et de quêtes associées, le tout appuyé par l’utilisation d’un scanner tendance Metroid Prime (décidément très à la mode en ce moment) afin d’étudier les différents objets ou créatures que l’ont pourrait croiser. Au final la réussite de ces quêtes fera augmenter un taux de viabilité planétaire, ouvrant peu à peu les possibilités sur chaque planète à commencer par celle de créer une colonie.

Contrairement à Dragon Age Inquisition néanmoins, ce taux n’est pas appuyé par la contrainte de devoir être augmenté pour avancer dans l’histoire et débloquer la suite de l’histoire et il s’inscrit dans la progression naturelle du jeu. Tout comme la possibilité de lancer des missions en « temps réel » qui constellait Inquisition, mais ne sont cette fois-ci qu’un aspect secondaire et totalement dispensable permettant juste d’obtenir des objets spéciaux. Ce sont de petits aspects qui montrent que tout en s’inspirant de la série de fantasy de leurs cousins d’Edmonton, Montreal a surtout su apprendre de leurs erreurs.

Et cela se ressent tout particulièrement au niveau des quêtes secondaires, pour le moins nombreuses  et trouvable aussi bien sur le Nexus central du jeu que sur les différents mondes. Du coup elles sont classifiées en différentes catégorie, trahissant leur intérêt et leur niveau de développement, les plus importantes étant les excellentes missions de loyauté liées à chaque compagnon, les plus insignifiantes étant de simples tâches aux buts généralement peu intéressant comme scanner des minéraux de part le galaxie… La majorité des quêtes néanmoins se trouvent quelque part entre les deux. On regrettera que leurs dialogues soient bien souvent limités à des dialogues non-cinématisés avec une animation minimale, voire médiocre. On appréciera néanmoins que le titre s’efforce à ce que toutes ces quêtes s’inscrivent dans la tâche de Pionnier occupée par le joueur, contribuant ainsi à cette impression de travailler pour le développement de l’initiative Andromède. La qualité d’écriture est variable, mais le résultat est globalement tout à fait sympathique avec des petites conséquences logiques et appréciables, ne serait-ce que de simples changements de dialogues après qu’une quête soit terminée (notons bien par ailleurs que le jeu n’oblige pas forcément à revenir voir les donneurs de quêtes même si leurs dialogues changent), donnant cette impression d’un monde vivant.

D’ailleurs c’est un aspect qui se ressent globalement sur la construction du monde : on croise beaucoup de PNJs dans chaque colonie (qu’elle soit pré-existante quand on arrive sur une planète ou construite suite à ses actions), n’ayant pour seul raison d’être que de simplement peupler les lieux et discuter, raconter parfois un peu leur rôle, leurs vies… et bon sang que ça fait plaisir de voir des lieux qui ne résument pas à des personnages décoratifs à qui on ne peut pas parler et à des PNJs là uniquement pour donner ou un jouer un rôle dans une quête. On sait les créateurs d’Andromeda très fan d’Ultima, et c’est dans cet aspect où clairement cette influence se ressent ! On regrettera néanmoins qu’à l’instar d’Inquisition le titre fasse l’impasse sur les cycles jours/nuits, mais le travail de construction d’univers est indéniablement une des grandes réussites.

Les Gardiens de la Galaxie (d’Andromède)

Là où Andromeda pourra surprendre néanmoins, c’est surtout par son approche narrative. Alors qu’on connait surtout Mass Effect pour son souffle épique et sa grande lutte galactique… tout cela est mis de côté dans cet épisode qui semble être parti dans l’optique d’un ton très clair : le fun. Car s’il y a bien une menace galactique contre l’initiative et des dangers menaçant les peuplades de l’amas d’Heleus, le titre prend le parti pris d’un ton bien plus léger aussi bien dans le traitement de son scénario que de ses personnages, avec une place non négligeable laissée à l’humour. C’est particulièrement le cas dans les interactions entre les compagnons, mais aussi tout simplement dans la personnalité du protagoniste, Ryder, beaucoup moins « serious business » que ne pouvait l’être le commandant Shepard. Sans paraître totalement décalé avec l’ambiance des autres épisodes, ça fait parfois un peu comme si on passait de l’Empire Contre-Attaque aux Gardiens de la Galaxie. Donc loin de la fresque épique, on se retrouve plutôt dans un univers pulp digne des serials d’antant. Qualité ou défaut pour le coup, cela dépendra de la sensibilité de chacun.

Mais au-delà du ton assumé du jeu, cela ne lui empêche heureusement pas de retrouver ce qui fait habituellement les qualités de Bioware a commencé par le cast très hétéroclite de compagnons. Comme d’habitude ils seront souvent développés au fil de conversations à bord du vaisseau et de leurs interactions avec Ryder (pouvant bien évidemment mener à des relations romantiques) mais aussi par les très nombreuses discussions se déroulant tout simplement en jeu pendant qu’on explore le monde, incitant à varier les compagnons pour vraiment tout découvrir. Du coup les compagnons sont une fois de plus une des grandes réussites de l’épisode, tous intéressants, tous développés, et tous disposants de quêtes personnelles.

Le trame de fond n’est pas en reste non plus, mais là encore on est dans une approche pour le moins différente : moins linéaire… mais moins focalisée aussi. Ce qu’on note c’est que tout est teinté de mystères… qui ne sont guères résolu au fil de l’histoire. On sent que le titre est avant tout là pour servir d’intro à de futurs épisodes.

Ceci dit le principal reproche qu’on pourrait faire à cet épisode c’est le manque dépaysement ressenti alors qu’on nous transporte dans une nouvelle galaxie. Si les raisons se tiennent sur un plan scénaristique et demeurent cohérentes, au final avec seulement deux nouvelles races on ne se sent pas trop loin de la voie lactée. D’autant que du coup la race ennemie des Keth peine à convaincre, pas foncièrement mauvaise, mais pas foncièrement impressionnante non plus, elle laisse plus l’impression d’une race qui ferait office de bon second couteau à un « vrai » méchant qu’à un ennemi réellement capable de tenir un jeu entier

Mais malgré ces quelques réserves, l’histoire n’en reste pas moins addictive avec cette envie d’en savoir plus devant tous les mystères de la galaxie d’Andromède et de l’Initiative et un final tout aussi explosif et passionnant que le début de l’aventure… mais qui laisse malgré tout cette envie d’une suite.

Combats débridés.

Du coup si par bien des points, Andromeda n’aura de cesse d’évoquer le premier Mass Effect…  il reste néanmoins un élément de taille où le titre n’a pas fait machine arrière et c’est au niveau de son système de combat et de son action débridée. Soyons clairs, si vous espériez un système de combat certes orienté action, mais qui à l’instar du premier épisode mettait en avant les choix de compétences et de caractéristiques… vous pouvez passer votre chemin. Sur ce plan Mass Effect Andromeda continue sur la voie assumée du « Third Person Shooter » de Mass Effect 2&3 et va même encore plus loin : en effet là, la où les suites restaient dans le carcan du « cover shooter » inspiré par Gears of War, Andromeda a décidé de libérer le système de ces limites : s’il est bien sur toujours tout autant possible de se planquer en couverture pour arroser les ennemis, le joueur est beaucoup plus incité à bouger dans son environnement, tirer dans le tas, esquiver les attaques, le tout étant d’autant plus appuyé par la présence d’un jetpack permettant de sauter (et canarder) en hauteur. Cette orientation action des combats est d’autant plus assumée au niveau des compétences déblocables à chaque niveau : toute orientées vers le combat et les différentes armes ou attaques et défences Tech ou Biotiques. Au final cela nous offre un gameplay nerveux et de nombreuses possibilités d’actions – d’autant que le nombre d’armes est pour le moins conséquent. Du coup les amateurs d’action seront aux anges : on s’éclate et c’est fun. Les autres bons… dirons que ce n’est pas non plus pire que ce qu’offrait les opus 2 et 3 de la série.

Pari gagné ?

Alors Andromeda a-t-il réellement réalisé la promesse de ME1 ?

J’aurais tendance à répondre un grand oui. En prenant une approche radicalement différente des précédents épisodes, on se retrouve au final plus devant un retour aux sources mais qui aura su tirer parti des erreurs du premier épisode et des derniers jeux du Bioware.

Pour le coup le jeune studio de Montreal a su offrir un travail qui n’a pas grand-chose à envier à celui de ses ainés, ne faisant que plus regretter que des impératifs commerciaux aient mené à une sortie aussi bâclée et remontant pour le moins en question la sortie d’une suite si attendue…

Points Positifs et Négatifs

+ Environnements magnifiques…                                      – …mais PNJs et animations parfois ratés.
+ Des quêtes secondaires sympathiques…                     – …mais qui sentent parfois le remplissage.
+ Un univers toujours aussi travaillé…                              – … mais qui manque un peu de dépaysement
+ Un excellent cast de personnages                                 – Des méchants un peu bateaux.
+ Un scénario très intriguant…                                           – …mais à quand la suite ?
+ Un gameplay enfin libéré de ses contraintes               – Musique plate
+ Grande durée de vie.                                                         – Le scan de planète toujours sans intérêt
                                                                                                 – Interface imbuvable en souris/clavier

Notes

Réalisation : 4/5

Souvent magnifique, Andromeda impressionne autant par ses environnements qu’il peut décevoir devant le rendu très inégal de ses PNJs et de ses animations. Dommage car cela lui empêche de devenir une vraie référence graphique dans le genre, d’autant que le tout est également desservi par une optimisation à la ramasse. On regrettera aussi une musique peu marquante, à des années lumières de la trilogie originale.

Combats : 4/5 ou 1/5 (C’est selon)

Nerveux et bourrin avec un nombre d’armes et de capacités vertigineux, les combats de Mass Effect Andromeda assument pleinement leur côté action en poussant encore plus loin les possibilités de jeu, libérant les combats du carcan un peu répétitif du « cover shooter ». Les amateurs d’actions prendront leur pied. Pour les autres par contre…

Scénario : 4/5

Avec son ton et son ambiance plus proche du pulp et son humour omniprésent, on est loin du souffle épique de la trilogie originale. Néanmoins on se retrouve devant un univers fascinant rempli de mystères et un excellent cast de personnages. Dommage que le tout manque un peu de dépaysement et que les méchants ne marquent guère. Au final on reste surtout sur l’impression d’une longue intro pour une suite à a venir.

Intérêt Global (fun) : 3/5

Situé quelque part entre le premier Mass Effect et Dragon Age Inquisition, ce nouvel épisode offre une expérience radicalement différente des autres épisodes autant par son gameplay que par son style narratif. S’il ne plaira donc pas à tout le monde, le résultat n’en reste pas moins tout aussi passionnant et addictif que ses ainés pour peu qu’on accroche à son concept. Un très bon jeu donc, mais dont l’état de sortie déplorable vient hélas entacher ce joli tableau. De ce fait je ne saurais donner en bonne conscience plus de 3/5 à Andromeda tant que tous les problèmes ne seront pas résolus. Considérez que le jeu aura droit à 4/5 du cœur s’il voit des problèmes résolus, mais en attendant que ce soit le cas je ne puis que conseillers aux joueurs intéressés d’attendre quelque mois avant de se plonger dans cette nouvelle galaxie.